En décembre dernier est sorti Canciones Del Sur du duo Violetazul composé d'Eliza Arciniegas (chanteuse Colombienne déjà entendue avec le groupe de Salsa Directo Caracas ou improvisant au violon et à la voix au sein du collectif PILS et sur son premier album sur leur label Momentanéa) et Christian Vergara Aguilar, guitariste Chilien déjà entendu dans des groupes locaux, également au cuatro, au charango et aux chœurs. Loin des clichés de la Salsa, du Tango ou de la Bossa Nova, Violetazul a décidé de faire mieux connaître les chansons d'Amérique du Sud qui composent leur culture commune.



L'album commence avec « El Mayor », chanson Cubaine « Nueva Trova » (la trova originelle plus sentimentale était chantée par des chanteurs ou chanteuses (comme Maria Teresa Vera) itinérantes s'accompagnant à la guitare, la Nueva Trova aborde des thèmes plus révolutionnaires après l'avènement de Fidel Castro) de de Silvio Rodriguès (), à la gloire du major Ignacio Agramonte, héros de l'indépendance Cubaine pour son centenaire. On peut déjà y apprécier les beaux aigus d'Eliza sur la guitare énergique de Christian.

« Papel del Plata » est un huayno (musique traditionnelle des Andes) anonyme de l'Altiplano (Plateaux du Nord de la cordillère des Andes s'étendant de l’Argentine au Chili et au Pérou), chanson d'amour aux paroles simples et touchantes .

« La Pomeña » est une zamba (chanson de gauchos dans laquelle s'est illustrée Mercedes Sosa à ses débuts) argentine de Gustavo Leguizamon et Manuel Castilla sur une femme la Poma et sa fille qui vont danser au carnaval, avec là encore une magnifique mélodie très bien chantée par Elisa. 


La chanson suivante est la seule que je connaissais : « Negra Presuntuosa » d'Andrès Soto, popularisée par Susana Baca qui a beaucoup fait pour la popularisation de la musique afro-péruvienne. Cependant « Nègra » ne s'adresse pas forcément à une noire en Amérique Du Sud, est aussi un terme affectueux. La version sans percussion « Cajon » (caisse de fruit) de Violetazul nous la fait entendre autrement et dans une tessiture plus haute et un joli scat.

Dans « Clavelito Blanco" (petit œillet blanc gardé comme un souvenir amoureux), autre huayno du Péruvien Justiniano Perez Aparicio, Christian utilise un « charango », petite guitare à 5 cordes doubles sud-américaine, anciennement fait en tatou, aujourd'hui en bois, rythmée par les cris traditionnels caractéristiques des musiques indiennes des Andes. 


« Diosa Coronada » est un vallènato colombien (chanteur itinérant s'accompagnant à l'origine à la guitare, puis plus récemment à l'accordéon) de Leandro Diaz () sur une petite histoire pittoresque et épique où le chanteur s'implique à la fin. Dans sa version, Elisa a remplacé la guacharaca (percussion frottée) traditionnelle par une râpe de cuisine alternative.

« A Pique » est une jolie ballade de l'Argentin Juan Quintero  suivi d' « Amapola » du Dominicain Juan Luis Guerra.

On parle aussi Portugais au Brésil (dont la superficie couvre une grande partie de l'Amérique du sud), et Violetazul reprend une jolie chanson de Caetano Veloso comparant le premier rayon du soleil à un « Leãnzinho » (petit lionceau) dont ils ont apprécié la poésie et qu'ils chantent à deux voix.

Autre chanson mystérieuse par ses paroles, popularisée par Caetano Veloso la « Tonada de Lluna Llena », repris de la tonada espagnole avec un cuatro (grand ukulélé à 4 cordes), lente incantation des vaqueros (cow boys d'Amérique du Sud) et transe chantée à la lune dans la plaine entre Venezuela et Colombie, dont on peut goûter dans leur version le charme envoûtant.

La chanson suivante de l'uruguayen Jorge Drexler, plus contemporaine, nous emmène « Al Otro Lado Del Rio » (sur l'autre rive du fleuve) avec un batelier.

C'est enfin dans la dernière chanson « La jardinera » de Violeta Parra (chanteuse et peintre chilienne qui exposa au Louvre et vécut à Paris et chanta en français « Ecoute mon petit » que Violetazul chante parfois en concert) qu'on trouve la violette bleue qui donne son nom au duo !

Allez voir Violetazul en concert, leurs reprises de ces chansons d'Amérique Du Sud sont très fidèles aux originaux mais ils savent aussi y imprimer une fraîcheur et une nouveauté qui leur est propre !

Jean Daniel BURKHARDT