CHASSY MARGUET SHEPPARD: LETTERS TO MARLENE au Fossé des Treize
Par jean daniel burkhardt le samedi, janvier 27 2018, 08:25 - JAZZ - Lien permanent
Après Shakespeare's Songs, le pianiste Guillaume de Chassy, le batteur Christophe Marguet et le saxophoniste Andy Sheppard présentaient Vendredi pour Jazzdor la Saison leur dernier projet "Letters to Marlene" au Fossé des Treize.
Avant le concert de Jazzdor, Guillaume De Chassy et Andy Sheppard devant les affiches historiques des précédents festivals Jazzdor!
Ce trio est porté par le lyrisme du saxophoniste Andy Sheppard, anglais mais vivant au Portugal.
Son
lyrisme me faisait penser à tous les grands saxophonistes lyriques de
Lester Young à Ernie Watts dans le West Quartet de Charlie Haden
avec le même procédé que charlie Haden dans Always Says Goodbye consistant à improviser en direct sur les enregistrements originaux!
Mais
celui que cela m'a fait le plus plaisir de revoir est le meilleur
batteur français, ou le plus collectif, le moins ego-trip, Christophe
Marguet, découvert après sa sortie par son quartet Résistance Poétique
avec Sébastien Texier au saxophone et à la clarinette, (vu à jazzdor en
2010 dont j'avais chroniqué le concert dans cet article.
Je
l'avais découvert avec le premier album éponyme de "Résistance
Poétique" bien après sa sortie et son prix de l'Académie Charles Cros en
1996. Marguet est un vrai BATTEUR (utilisant
uniquement la batterie: toms et cymbales) ou un percussionniste sur sa
batterie sans sans autre percussion, finissant même le concert à mains
nues sur un petit tempo latin.
Marguet est capable de tenir un effet rythmique assez longtemps pour faire lentement monter l'intensité musicale.
Marguet
joue des notes, pas que des rythmes, à la baguette, ou brosse au balais
un style pictural et mélodique sur ses cymbales comme un peintre sur sa
palette!
Mais
Marguet sait aussi assumer le côté rythmique voire martial (important
pour ce projet Letters To Marlene inspiré de Marlene Dietrich qui quitta
l'Allemagne nazie puis chanta pour les alliés dans un froid glacial
dans les Ardennes) des tambours.
Troisième
membre de ce trio, le pianiste de formation classique mais autodidacte
dans l'improvisation Jazz Guillaume de Chassy, qui j'avoue ne m'a jamais semblé aussi jazz!
Par
un style piqué et furtif, martelant parfois la même note, et par ses
composition comme l'éponyme "Letter To Marlene" ou ses chansons comme
Lili Marlene chantée dans les deux camps pendant la dernière guerre, Guillaume de Chassy rend un vibrant hommage à Marlene Dietrich.
Guillaume De Chassy usa même d'un procédé contemporain: frappant toujours la même touche
obstinément d'un seul doigt, et bloquant de l'autre main la corde dans
l'intérieur du piano, comme Bobo Stenson, Sylvie Courvoisier ou Eve
Risser, qui ont démocratisé les techniques du piano préparé.
Mais
la force de ce trio est sa cohésion et son écoute à chaque instant,
avec l'un des trois partant librement sur le soutien indéfectible des
deux autres, qui fait du jazz l'un des plus beaux exercices de
démocratie musicale où l'on est tour à tour soi et au service des
autres.
Ce
répertoire rend autant justice au courage de Marlene Dietrich refusant
de rentrer en Allemagne (quitte à ne presque jamais y revenir) (les
évènements politique étant incarnés par les voix enregistrées d'Hitler,
Churchill et De Gaulle) qu'à sa carrière
d'actrice avec Jean Gabin dans Martin Roumagnac, que de chanteuse avec
son tube de "L'Ange Bleu" , femme fatale de Sternberg "Ich bin von kopf
zu fuss für liebe eingestellt" devenu très vite en anglais "Falling In Love Again" qui me fit pleurer quand Andy Sheppard joua sur sa voix.
Le talent de Christophe Marguet, c'est peut-être d'être toujours en soutien rythmique des autres, mais toujours de façon personnelle.
Christophe
Marguet est l'un des batteurs les plus précis et mesuré dans ses
effets, les plus musicaux, qui ne se met pas toujours en avant, un peu
comme Dré Pallemaerts mais avec plus de puissance et un aspect plus rock
et underground.
Le disque est sorti au printemps.
Jean Daniel BURKHARDT