Vendredi 25 novembre dernier, la chanteuse brésilienne Flavia Coelho était programmée au Préo d’Oberhausbergen par Francis Zaniboni, qui l’avait déjà programmée au début de sa carrière dans son Festival Les Nuits Européennes. Originaire du Nordeste brésilien, elle arrive en France en 2006 « avec 200 euros et une veste pas très chaude » et a commencé en jouant « contre des demis » puis a sorti « Bossa Muffin » en 2012, augmenté en Deluxe Edition en 2013, « Mondo Meu » en 2014 et tout récemment « Sonho Réal » en octobre dernier!

 

 Elle arrive une guitare sans caisse en bandoulière, accompagnée du claviériste Victor Vagh aux effets dub et d’un batteur noir qui pourrait être Jamaïcain et marque son premier coup de cymbale de bas en haut. Elle joue Reggae sur « Con Migo », mais chantant Ragga quand elle accélère. Ce mélange de débit ragga sur de la musique Brésilienne et en brésilien est sa marque de fabrique qu’elle a appelée « Bossamuffin ». Dans son enfance nordestine, la radio était branchée sur les ondes de la Jamaïque. Très énergique, elle monte sur une estrade sur scène entre clavier et batterie et secoue ses cheveux en transe en ondulant comme un serpent dans son legging noir décoré en blanc de signes tribaux à la Keith Haring .

Toujours positive, « la vie est belle et pure » dit-elle, et elle « Pura Vida » comme cette  chanson du dernier album qui lui va comme un gant, plus rapide en live, avec clavier sautillant et elle en accélération ragga.

Elle nous amène dans son « Sunshine » entre Brésil et Jamaïque (enregistré sur son premier album) aux vocaux « Ayo Ayo » rappelant Bob Marley sur la batterie bien roots et son clavier imitant dans son jeu un accordéon vallénato colombien, le Baião de Luiz Gonzaga ou le Forro remis au goût du jour par Nazaré Pereira, musiques du Nordeste comme elle utilisant l’accordéon, mais aussi le contretemps du ragga, puis les sirènes jamaïcaines comme au Festival Reggae Bash Live. Par moments le clavier accordéon flirte même avec la Lambada volée par Kaoma à un groupe Bolivien découverte comme une danse et un genre musical du Brésil, très populaire en 1989, qui mélange carimbo, reggae, salsa et merengue. Lors de cette danse un couple, corps contre corps, ondule des hanches et des épaules et place de temps en temps un de ses genoux entre les jambes du partenaire. La lambada (danse) continue aujourd'hui de se développer au Brésil et ailleurs au travers de son évolution : le lambada-zouk. On pourrait même remonter à Gabriel Fauré m’a-t-on dit!

Son « Paraiso », c’est d‘« être avec vous ce soir », plus  énergique que sur le dernier album. Nous sommes sa « periphéria », sa « famila » (famille périphérique) ce qui est une belle idée, entre deux éclats reggae dub du clavier et roulements de la batterie et elle tournoie périphériquement sur la petite estrade, puis part en moonwalk transversale vers les coulisses et y disparaît, nous laissant seuls avec le clavier dub et le batteur aux effets pull up jamaïcains, mais ils sont bons, ça fait une petite instru rubadub à la Sly & Robbie..

Elle revient pour « A Foto »,  une chanson plus calme pour son père, docker dans son enfance, sa mère maquillant les premiers travestis brésiliens, pour s’excuser de ne pas revenir plus souvent au Brésil et qu’il ne pleure pas (), avec le clavier au mélodica (en Jamaïque,c’est Augustus Pablo qui a donné les lettres de noblesse à cet instrument dans le reggae dub live), elle faisant la basse sur les grosses cordes de la guitare.

La chanson suivante est « contre l’agression envers les femmes » (c’était la journée de la femme) : « Nous on a pas besoin de violence mais d’Amour, des amis qui deviennent des frères comme une famille, comme mes musiciens et comme vous ce soir !», plus pêchue et dub sur scène, puis soudain le batteur accélère sur la cymbale ride sur un rythme afro avec le clavier comme lors de ce magnifique « Concert à la bougie » pour Culture Box (). La rythmique me fait penser à ce moment aux « Trio Electricos » sur des camions qui parfois ont remplacé les musiciens live pour le carnaval dans le Nordeste. Cela me rappelle pionniers du Samba Reggae le groupe  Ile Axé  et son album et « Calyps’o Samba » avec  leur chanson « Gorée » (Voix de Métal)!

Sur son nouvel album, Flavia Colho s’est même essayée « à la langue de Molière avec un petit jeu de mots », « Temontou » pour « T’es Mon tout » () et dit avec humour « de toutes façons vous comprenez pas ce que je chante alors ça change pas »! C’est vrai que sur l’album je ne m’étais pas rendu compte qu’elle chantait en français! Mais le clavier et la mélodie, le rythme m’avaient tapé dans l’oreille dès la première écoute. Après information on goûte aussi le texte très joli (« tu es mon haut, mon bas, tout ce que j’aime,ma vie et mon trépas!», et  elle est plus compréhensible qu’une autre Brésilienne du Nordeste, Elis Regina (pour moi la plus grande des chanteuses Brésiliennes des années 60 70) dans « Le Récit De Cassard » de Michel Legrand, plus rythmée et exotique que dans « Les Parapluies de Cherbourg » de Jacques Demy!

L’accent fait partie du charme des musiques exotiques et d’ailleurs. Un accent c’est un voyage d’une langue par le véhicule d’une autre. En français elle me fait penser à une autre chanteuse à accent, Hindi Zahra, Tunisienne celle-ci, dans « Un Jour » par l’émotion supplémentaire qu’elle procure! 

Elle enchaîne sur un bon reggae rubadub à deux temps à la Gainsbourg (dont elle a repris « Vieille Canaille » à la Alpha Blondy) avec des descentes de claviers  sur « Bom Bom ».

i

Elle contnue en Ska punk chtiirioptiriop ou Rocksteady  sur le rythme de « A Message To You Rudie » de Dandy Livingstone repris j’aurais juré par les Clash, ou plutôt les Specials que je connais moins avec plus de cuivres avec des drôles d’effets dans le clavier!

« La drague est ouverte » sur « Por Cima », ballade de Mondo Meu: le rythme de guitare un peu bachata se prête bien aux rapprochements chorégraphiques, comme les claviers dégoulinants d’amour, puis  enchaîné en « Venti Pinta » plus rythmé ragga sur une bonne batterie aux breaks dub. D’ailleurs le batteur n’est pas Jamaïcain mais Martiniquais (grand pays de reggae et de sound systems aujourd’hui, Kaya P en a invité certains dans la région).

Elle repart en « Bossa Muffin » plus funky dirigeant le public dans une choré endiablée.

 

En premier Bis elle ondule sur « Tchin Tchin » sur les accords rythmés reggae du clavier.

En tous cas, c’est indéniablement une vraie tornade sur scène aux claviers très changeants du R’N’B à l’électro en restant Reggae et à la bonne batterie reggae ragga roots pull up, et elle secouant les boucles de ses cheveux rouges  jusqu’à la transe sur le même thème « Here I Come», rubadub de Barrington Levy dont elle reprend souvent la rythmique.

Bref, le Reggae à la Brésilienne ça le fait et elle excelle en Reggae roots, dub, ragga, ska, rocksteady mélangés à la cumbia, à la samba Brésilienne, au Forro et au Baiãn de son Nordeste !

 

Prochain Concert organisé par Francis Zaniboni au Préo : Vendredi 9 décembre à 20 h A-Wa, trois sœurs Yéménites d’Israël découvertes aux Transmusicales de Rennes et produites par le producteur des Balkan Beat Box ! Ne ratez pas  leur Folk’N’Beat!

 

Jean Daniel BURKHARDT